Pourquoi la ligue veut-elle dédoubler partout les enseignants du public ?

Voici le texte d’une de mes interventions dans le cadre du Conseil d’arrondissement du 1er décembre 2014, à propos d’une subvention de 13.600 euros à la Ligue de l’Enseignement Fédération de Paris au titre de la lutte contre les discriminations et des droits de l’Homme (2014 DDCT 188).

ecoleSi je comprends bien cette subvention, elle a pour but la « coordination du Plan local de lutte contre les discriminations dans le domaine de l’emploi 12ème ».

Le tout pour 13.600 euros ! (Plus que, selon le document fourni dans le dossier, ce que l’association a sollicité, à savoir 10.000 euros).

En observant le détail, cette action se résume à la réalisation de prospectus, la mise en place d’un stand au forum de l’emploi et une formation. Or, je n’arrive pas à comprendre l’ampleur du coût et son opportunité, rapportés à de telles actions. Il existe déjà énormément d’informations accessibles sur le sujet par exemple, sur le site « service-public.fr » par exemple, ou sur le site du rapporteur des droits ou des maisons des droits ou d’autres sources institutionnelles. Bien mieux, à l’école, les enseignants sont parfaitement compétents pour informer sur les discriminations.

[pullquote align= »left|center|right » textalign= »left|center|right » width= »30% »]Pourquoi la ligue veut-elle dédoubler partout les enseignants alors que ces derniers, s’ils ont une qualité particulière, c’est parce qu’ils agissent dans le respect du principe de neutralité du service public ?[/pullquote]

Pourquoi la ligue veut-elle dédoubler partout les enseignants alors que ces derniers, s’ils ont une qualité particulière, c’est parce qu’ils agissent dans le respect du principe de neutralité du service public ? La mission de l’école n’a pas pour vocation à déborder celle-ci, sauf à vouloir renvoyer tous les citoyens en enfance, nécessiteux d’une éducation que seuls certains seraient à même de leur dispenser !

Je pourrais m’arrêter là. Car j’imagine déjà la posture de gardiens des sacro-saints « principes républicains. », tels des vestales du feu sacré, que certains d’entre vous seraient tentés d’adopter, en caricaturant mes propos, bien sûr…

Alors, j’ai deux observations.

1.   Ces propos moralisants n’impressionnent plus personne, en tout cas plus dans ma génération – je suis de la génération Mitterrand – qui a été élevée, suivant le dogme de la Ligue, au son des « Valeurs de la République, du Progrès et de l’Egalité » mais qui, une fois sur le marché du travail, ne voit à la place que nivellement par le bas, régression sociale, sans parler des inégalités entre privé et public et de maints autres privilèges.

Pourquoi je dis cela ? Car à l’instar de Corinne Tapiero, j’ai aussi contracté une certaine passion de la lecture, celle de l’exposé des motifs des subventions et je n’ai pas été déçu !

Je cite : « Si nos principes républicains fondés sur la Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen impliquent de traiter également chaque citoyen sans distinction, force est de constater que les discriminations continuent d’exister en France dans de nombreux domaines »

N’importe qui peut se placer sous le patronage de cette déclaration historique !

Pour être honnête, dois-je vous rappeler d’ailleurs, et sans ironie, qu’elle a été conçue pour figurer en préambule d’une constitution monarchique (celle de 1791), et qu’elle a été signée et approuvée par Louis XVI ? Je vous rassure, je ne fais pas ici l’apologie de la monarchie, car comme l’a bien proclamé le deuxième président de la République, « la république est le régime qui nous divise le moins ».

Mais tout cela pour dire que cette déclaration est le patrimoine de tous et que si elle ne se réduit pas à la République, comme je l’ai indiqué, elle se réduit encore moins à la gauche ! Or voilà, celle-ci a tendance, depuis fort longtemps, à s’attribuer le monopole de certaines choses, pour faire avancer, sous des discours unanimistes vantant les « valeurs de la République », sa propre idéologie, pour imposer ses propres constats, sa vision de la société, du sens dans lequel elle doit évoluer, le tout travesti sous les dehors de « lutte contre les discriminations et les préjugés ».

Les Conseillers d'opposition lors du Conseil d'arrondissement du 3 décembre 2014

Les Conseillers d’opposition lors du Conseil d’arrondissement du 3 décembre 2014

Et vous le savez très bien ! On voit cela partout, et dans les écoles justement, qui plus est, financé par l’argent de tous les contribuables, y compris de ceux qui ne partagent pas votre sensibilité. Alors la République a eu ses fameux hussards noirs, sous la IIIe, et c’était évidemment pour finir de consolider l’attachement des Français à ce régime. Mais un régime, ce n’est pas une nouvelle religion, avec ses dogmes Laïcité, Mixité etc. C’est pourtant ce à quoi l’on assiste et (à quoi) la Ligue de l’enseignement contribue.

Ainsi, en allant sur son site, j’y lis, à propos d’une table ronde dont les débats seront rediffusés sur France culture (!), que le but de l’école serait de « fabriquer de la mixité sociale ». Je pensais naïvement qu’elle servait avant tout à transmettre de la connaissance, de qualité.

[pullquote align= »left|center|right » textalign= »left|center|right » width= »30% »]Selon la ligue, le but de l’école serait de « fabriquer de la mixité sociale ». Je pensais naïvement qu’elle servait avant tout à transmettre de la connaissance, de qualité.[/pullquote]

Mais la ligue ajoute que cet objectif de fabrique serait difficile à cause des « stratégies éducatives des parents visant à sélectionner des établissements qui leur ressemblent ». Cela ne leur a pas traversé l’esprit que les parents cherchent avant tout la réussite de leurs enfants et donc à les placer si possible dans des établissements où le niveau est un peu meilleur ! Rien à voir avec les préjugés inégalitaires. La cause de cela, et c’est malheureux, en effet, est bien la baisse de la qualité de l’école, où dans certains contextes difficiles, les savoirs fondamentaux ne sont plus acquis !

J’en viens maintenant, rapidement, à mon deuxième point [avec la réforme du règlement intérieur du Conseil d’arrondissement, le temps de parole est limité à 5 minutes]

2. La discrimination (cad, le traitement inégal de deux situations semblables) est par nature un délit pénal qu’il faut effectivement combattre avec la plus grande fermeté. Cela relève du domaine régalien : c’est une mission de l’Etat. C’est donc à la justice de faire ce travail, ou, dans le domaine de l’emploi, aux inspecteurs du travail.

Mais que répondre à ceux qui vivent des situations d’inégalité ou éprouvent un sentiment de discrimination, lorsqu’un des meilleurs acteurs de la lutte contre la discrimination au travail, à savoir un inspecteur du travail, dispose lui-même de privilèges en pouvant faire valoir ses droits à la retraite dès 52 ans ?

Franck Margain et moi-même avons voté contre. Valérie Montandon, Isabelle Tavaux et Corinne Tapiero se sont abstenus

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